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Siurana

18 avril 2000, 

Vous en avez sûrement déjà entendu parler. La Rambla, c'est cette ligne en 35° de dévers sur 45 mètres de longueur, c'est La voie par excellence. Un itinéraire d'anthologie pour deux uniques répétitions. Un 8c+ naturel que seules deux personnes sur terre peuvent se vanter d'avoir enchaîner. Autant dire de véritables petits fortiches.

Davy dans Cafe con lecheCes deux individus sont de véritables personnalités dans le monde de l'escalade. Pas de secrets, il s'agit de Dani Andrada, le surdoué espagnol, et d'Alexander Huber, aussi connu pour sa fameuse ascension de Salathé Wall au Yosémite.
Autre fanatique, mais rassurez-vous d'un autre niveau, je m'en suis allé avec deux joyeux compères au pays de La Rambla. L'occasion étant réelle de vous faire envier le soleil et les quelques 25°C auxquels nous avons eu droit pendant cette semaine de détente, voici le récit de ce petit voyage.

Il arrive en effet qu'après une petite année sans congés, certains soient pris par une envie irrésistible de quitter une Belgique pluvieuse quelques jours durant. Une fois n'est pas coutume, ce fut le cas de votre serviteur, de Lolo (Laurent) et de Davy Crocket (Tom).
L'Espagne, ce n'est naturellement pas la porte à côté, mais un tel sentiment de besoin nous habitait que nous décidâmes sans détour d'effectuer quelques heures de trajet supplémentaires hors de France en direction de Siurana à 150 km au Sud de Barcelone.

Un prieuré pour prier... le dieu de l'escalade

 Pour la petite histoire, ce spot réputé à travers le monde entier pour sa célèbre voie se trouve être également un ancien prieuré planté en haut d'une colline. Et à l'image de toutes ces abbayes moyenâgeuses édifiées au temps de nos illustres ancêtres, plus hautes étaient celles-ci, plus proche était le Seigneur ou autre version, plus haut elles étaient construites, moins accessibles elles étaient aux Sarrasins ou autres envahisseurs quelconques.

Davy dans une voie en 7a à Montsant Cela explique peut-être le choix du lieu, véritable amoncellement de cailloux qui entourent ce promontoire devenu entre-temps hautement touristique. Des falaises en veux-tu en voilà. Quelques 500 voies (on n'a pas compté) disséminées sur plus de deux kilomètres de falaise. Et pour finir, un potentiel quasi inépuisable ! Pour preuve, le dévers qu'occupe La Rambla est encore vierge de tout autre ouverture. Avis aux amateurs.

Siurana, de tout et de rien

Première surprise, la profusion d'itinéraires était tellement importante qu'arrivés au pied de la première falaise qui nous tomba dessus, nous nous demandâmes si 8 jours nous permettraient de faire le tour du propriétaire.
Et bien, après analyse, force est de constater que cela ne fait aucun doute. Siurana regorge il est vrai de voies de tous niveaux, approximativement de 4 à 8c... Par contre, la profusion des styles ou la déclinaison d'un grand nombre d'itinéraires dans un seul genre laisse grandement à désirer. A moins que vous fassiez du 8b...
Cela étant dit, une chose est sûre, plusieurs semaines vous seront sûrement nécessaires pour découvrir les moindres subtilités de ce véritable paradis minéral.

Du gruyère made in Spain

Du dévers, beaucoup de trous, des biceps et des voies qui requièrent principalement une haute dose de résistance. Comme un peu partout dans la région, vous aurez effectivement droit à des cauchemars sous forme de gruyères.
Autant se l'avouer, tant dans sa physionomie cette falaise peut ressembler à Freyr, tant au niveau géologique elle s'apparente à Buoux, la célèbre falaise du Lubéron français.
En final, nos deux premières journées sur place furent des plus calmes. Agrémentées de petites randonnées dans la broussaille, elles furent utiles pour découvrir les recoins les plus intéressants du site.  Une voie de 35 mètres : impressionnant

Campi qui pugui

Ce nom, tournez sept fois votre langue dans votre bouche avant de le prononcer... Campi qui pigui, c'est le spot phare de Siurana. En d'autres termes, une succession quasi ininterrompue de problèmes allant du 7a au 8c, avec, pour l'échauffement, une ou deux exceptions en 6b+...
Vous l'aurez compris, c'est l'endroit à ne pas louper si vous avez quelques prétentions dans le 8ème degré?
Cela n'étant le cas ni de Lolo, ni de Davy Crocket, ni de moi-même, nos rares incursions dans ce coin reculé furent consacrées à enchaîner les jolis petites voies " abordables " qui avoisinaient le secteur dur.

Ainsi, Isadora donde estas et Delicatessen, toutes les deux 7b, ne résistèrent pas longtemps à nos assauts. A noter également le passage de Lolo et Davy dans Un rato en cada postura, 8a tout de même, qui leur fit clairement comprendre que maîtriser une telle voie à trous nécessiteraient quelques heures d'études supplémentaires sur les propriétés de l'Emmental suisse?
A conseiller vivement, Toca-me-la-sam, un superbe itinéraire vertical de 20 mètres de haut tout en finesse. Côté 6c, il vaut le détour pour la pureté de sa ligne.

Syndrome belge

Est-ce dû au fait que nous possédons une falaise multi-facettes comme Freyr ou simplement la conséquence d'une trop grande fréquentation des salles, mais la lassitude nous vit partir à la recherche d'un autre secteur dévers.

Lolo dans Bistec de biceps, ça se voit Syndrome typiquement belge comme celui de porter des débardeurs alors que les grimpeurs espagnols sont encore en cols roulés et polaires ou simple folie de vacances ? Qui pourra nous le dire ? En tous cas, après une petite réorientation, nous arrivâmes enfin à ce que nous recherchions : du dévers, du vrai.

L'olla

Le secteur L'olla est situé à quelques encablures de la fameuse Rambla. D'ailleurs, pour y parvenir, pas moyen de la manquer, vous serez obligé de passer en dessous, littéralement.
Un peu plus petit mais pas moins impressionnant, nous parvînmes enfin au secteur en question et découvrîmes avec satisfaction que la vague qui caractérisait ce secteur était parsemée de voies dans tous les niveaux. Et comme d'habitude, plus on monte vers le 8, plus c'est dévers (ndlr. on n'a jamais vu le contraire).
Trêve de bavardages? Après un rapide mais efficace échauffement dans le magnifique 6b+ Mayling, les choses sérieuses purent commencer. Un passage éclair dans Burden Chuchen nous permit de constater que cela tirait fort dans le 6c et pas le temps de dire ouf que nous nous retrouvions déjà à travailler deux incroyables 7b+, Bistec de biceps et l'inconnu.
Ces voies de type résistantes furent l'occasion pour Lolo et Davy de faire deux croix de plus, alors que votre serviteur s'évertuait quant à lui à évacuer les volutes d'alcool emmagasinées la veille?
Ces deux perfs étant d'ores et déjà acquises, les gais lurons se permirent de tâter à la trompe de l'éléphant, ligne reconnaissable entre toutes par son départ si caractéristique. Manque de chance, c'était aussi un 8a et après une dure séance comme celle-là, les colonnettes évasées de la trompe étaient trop difficiles à tenir.

Montsant : dépaysement

Tout séjour a malheureusement une fin et le nôtre également. C'est pourquoi nous décidâmes de laisser Siurana tranquille pour un jour afin de nous diriger vers une falaise à propos de laquelle nous avions entendu beaucoup de bien : Montsant.

Davy sort les watts dans ce 7b+

Impossible à éviter, Montsant ressemble plus à une grande face à longueurs qu'à un laboratoire du haut niveau. Nous y parvînmes donc après une petite randonnée pour nous apercevoir immédiatement du potentiel incroyable qu'elle possédait.
Là, plus de calcaire mais du poudingue, ce rocher si particulier composé d'un mélange de galets et de trous générés par la disparition des mêmes cailloux.

Incroyable devrait être le mot. Inimaginables furent les sensations que nous éprouvâmes en escaladant les deux premières voies qui se présentaient devant nous : deux 6b+, Being a star in Tokio et Cafe con leche.
Montsant, c'est tout cela. Des sensations, des placements fins et surtout de la technique. Les voies ne manquent jamais de prises mais il vaut mieux être armé d'une bonne continuité pour trouver le meilleur des 5 trous qui se trouvent devant soi.
Vous l'aurez compris, ici pas de chichi. A bas les gros bras et vive les chaussons acérés.

Examen réussi mais repassage obligé

C'est donc avec un sentiment de devoir accompli que nous quittâmes Siurana et par là-même l'Espagne. A la vitesse où vont les choses, il se peut d'ailleurs qu'à l'occasion d'un prochain passage, les choses aient tellement évolué qu'il vaudra beaucoup plus la peine de venir ici que dans le Sud de la France, coût de la vie oblige.

Cependant, la vie trépidante du monde de l'escalade nous amène chaque jour son lot de surprises. D'ouvertures de voies dans des sites connus en découverte de nouvelles falaises, la course à l'équipement est lancée. Qui de la France ou de l'Espagne va l'emporter ? Peu de personnes peuvent le dire vu l'immensité du potentiel existant dans les 2 pays.
Par contre, Siurana est et reste un passage obligé pour tout grimpeur qui se respecte. Par son ancienneté, elle marque toute l'expérience de l'escalade espagnole.
A propos d'expériences, grimper ne devrait pas vous empêcher de profiter du charme des nombreuses stations balnéaires ibériques. Vous n'avez donc plus le choix. Viva Espana.

Hubert


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